Le défi de Don Quichotte
Dernières Nouvelles d'Alsace - mercredi 10 août 2011 - pages Haut-Rhin
Comptant déjà une remarquée adaptation du Gargantua de Rabelais en 2009, les Mattagumber de Mooslargue dévoilent en cette fin de semaine leur version de Don Quichotte de Cervantès.
A voir sa popularité, la monumentale œuvre de Miguel de Cervantès n’a presque pas pris une ride… peut-être parce que le visage émacié de Don Quichotte ne leur laissait plus de place ? Toujours est-il que l’Ingénieux Hidalgo, propulsé au panthéon des défenseurs des causes perdues, en a fait rêver plus d’un et frémir quelques autres, dont une bonne collection de metteurs en scène ou réalisateurs qui connurent des fortunes diverses -d’aucuns susurrent qu’il y aurait quelque malédiction…- à adapter l’illustre personnage.
Téméraires ou bardés de talismans, les Mattagumber ont choisi de relever le gant. Et ce ne sont pas les idées qui manquent du côté de Mooslargue, village sundgauvien en amont de la Largue dont le groupe de danse traditionnelle chausse élégamment depuis neuf ans d’autres répertoires. Sans oublier ce qui constitua leur base, les danseurs se sont ouverts à d’autres arts avec une belle réussite, flirtant avec le conte russe L’Oiseau de feu, le mythe sumérien de Gilgamesh, l’hommage à la littérature et aux recoins de la bibliothèque ou aux chants de guerre à travers les siècles en convoquant théâtre, musique ou vidéo avec inventivité et enthousiasme.
Après avoir remporté un fou succès public en 2009 en revisitant l’œuvre de Rabelais dans un copieux Gargantua, les Mattagumber s’attaquent donc à Don Quichotte. De sa « jubilatoire » immersion dans une œuvre complète assortie de compléments qu’il s’est défié de catalyser avant de la mettre en scène, Mathieu Lavarenne a cherché l’essentiel. Ainsi que l’inattendu en retrouvant un récit foisonnant recouvert par 406 années d’idées reçues. Et, s’il garde tout son charme, le sieur Quichotte y apparaît plus contrasté et plus ambivalent que la patine des siècles n’en conservait le souvenir. De fait, l’image du défenseur de la veuve et de l’orphelin risque bien de prendre une claque, sans perdre en cette loufoquerie qui fait le piment des péripéties de l’hidalgo et son écuyer. La troupe aime rire et le public en profite, sans jamais sacrifier ce qui fait sens comme elle l’a régulièrement démontré par le passé en ouvrant les perspectives vers la philosophie, la poésie ou la politique sans forcer le trait.
Ce Don Quichotte s’annonce en belle surprise, que les internautes peuvent déjà appréhender sur le profil du réseau social facebook d’un chevalier décidément à la page.
Nicolas Lehr
Jeudi 11, vendredi 12, samedi 13 et dimanche 14 août à 21 h en plein air, à côté de la salle polyvalente de Mooslargue. Entrée libre, plateau. Don Quichotte, sur Facebook